Interview : Manu Le Malin

Avec le deuxième volume de ses aventures bioméchaniques, le Dj hardcore français le plus titré à
l'étranger apporte la preuve tangible de l'évolution du mouvement vers une maturité musicale toujours plus fréquentable.









Surprise : il ne faut pas moins de 9 titres pour retrouver la veine brouillonne et bruyante du premier Biomechanik, mixé il y a plus de trois ans par les mêmes doigts d'expert. Comme si Manu le Malin s'était assagi, avait pris le temps de la réflexion avant de livrer un mix plus mental que brutal, même si la fin du CD mixé le voit renouer avec la hargne de ses débuts. Alors, simple parenthèse ou véritable mutation ?

"Il y a presque trois ans entre Biomechanik 1 et 2 et je crois que les deux volumes n'ont pas grand-chose en commun. Sur B2, j'ai mis beaucoup de vieux titres comme un clin d'oeil nostalgique au son que j'affectionne le plus, le son rave : PCP, Mescalinum United, Panacea. 9 mois auront été nécessaires pour faire la sélection, et je pense que ce deuxième volume est beaucoup plus travaillé. En tout cas, j'en suis beaucoup plus fier."

Il y a de quoi puisqu'à côté d'un impeccable mix de 27 titres, on trouve un CD2 non mixé, centré sur les nouvelles productions du clan Bloc 46, des titres qui dormaient dans des tiroirs depuis deux ans et qui prouvent une variété d'inspiration nouvelle, alimentant les conjectures sur un premier véritable album du Malin en personne.

"Je ne vois pas l'intérêt d'un troisième Biomechanik. Par contre, je crois être enfin prêt pour le format album même si je n'ai encore aucun morceau d'avance. Ce qui est sûr c'est qu'il y aura des trucs drum'n'bass, ambient, techno. Ça fait déjà un bout de temps que je me bats contre la surenchère de bpm. Question de feeling artistique, mais aussi pour des raisons techniques : pour rentrer dans les détails, je bosse sur Cubase qui s'arrête à 250 bpm. Ceux qui travaillent sur Amiga ou PC n'ont aucune limite. Du coup, je me suis fait casser pendant des années par la scène hardcore à cause de mon son lent, dark, midtempo."

Les clivages n'ont donc cessé de s'accentuer. La scène hardcore s'est énormément fragmentée et le torchon brûle parfois entre le public des free, le clan gabber et ceux qui vont en rave.

"Le cocon est de plus en plus large, reconnaît Manu. Mais, à l'image de ce qui s'est passé sur la Technoparade où tous les sons, tous les publics étaient mélangés, on a tous davantage tendance à se replier sur nos racines pour ne pas donner de raisons de se réjouir à nos détracteurs. Pour ma part, je retourne vachement en free, je reparle à des mecs qui ne venaient plus me chercher parce qu'ils pensaient que j'étais devenu intouchable."

On revient progressivement à des valeurs de rassemblement tout en tirant la production vers des choses plus pointues. C'est le pari que nous devons tenir dans les mois qui viennent, toute la petite équipe autour de Bloc 46, Micropoint, Hô, ou Olive sur Marseille : gérer l'engouement d'une scène arrivée à maturité en essayant d'élargir la production hardcore vers des choses plus musicales.

Biomechanik 2 (Level 2/F-Com/Pias)